Obama, saison 1 épisode 1…

Barack Obama a enfin pris ses fonctions devenant le 44ème président des États-Unis. L’Obamania va finalement laisser place au pragmatisme et à l’analyse, c’est Obama lui-même qui a sonné le glas de la frénésie entourant son élection en livrant un discours (vidéo) sans promesses de réussites mais avec une ligne morale forte confirmant un désir de réforme.

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Si l’inauguration portait une charge symbolique énorme faisant écho à la ségrégation raciale qui a gangrené le pays durant des décennies, elle n’a pas pour autant amenée d’éléments nouveaux concernant la politique qui sera mise en place. Cela aurait il été nécessaire… nous en savons déjà beaucoup sur l’orientation de l’administration Obama de part les nominations au sein de son administration, mais aussi grâce à son programme très détaillé qui sera donc scruté à la loupe tout le long de son mandat.

L’investiture : une journée historique pour les activistes.

Le hasard du calendrier aura été porteur de symbole, en effet l’investiture a eut lieu au lendemain du Martin Luther King Day,  jour férié ayant lieu tous les 3ème lundi de Janvier. Cette corrélation doit nous éclairer sur le symbole que représente l’élection d’Obama. Il ne faut pas voir au travers de l’élection d’un noir à la tête du pays le plus puissant du monde le signe d’un changement politique de facto, bien que le programme de ce dernier ait une orientation divergente de la politique américaine post-reagan de part la force du contexte économique et de la désastreuse présidence Bush.

Non, cette élection est surtout un signe majeur que même dans un pays ayant pour valeur centrale l’argent, le profit, les valeurs humaines peuvent avancer grâce à l’activisme. Les mentalités ont changé en raison du travail des activistes durant des décennies, en particulier le travail du “Civil right movement” a contraint les gouvernements successifs a faire évoluer le socle des lois civiques par son lobbying. Or aujourd’hui encore l’activisme est combattu par ceux qui louent les vertus de l’activisme du passé, les républicains et les démocrates applaudissent le résultat des combats pour les droits civiques quand dans le même temps ils réprouvent régulièrement le combat d’associations pacifistes considérés comme parasitaires et parfois même soupçonnées d’activités terroristes (sic) comme code pink il n’y a de cela que quelques temps. Le même comportement schizophrène se trouve aujourd’hui au sein du gouvernement de droite en France: on applaudit à tout va l’élection d’Obama quand dans le même temps on pratique des politiques répressives que seuls les activistes combattent, les reconduites à la frontière et le combat de RESF en sont le meilleur exemple, et qu’on aille pas me suggérer que la loi reste la loi, car sans le travail des activistes la loi aux USA n’aurait jamais permis l’arrivée au pouvoir d’Obama.

Il convient de noter que l’establishment, que ce soit les médias ou les puissances financières (auraient elles perdues de leur influence?) , n’ont pas enfreint l’ascension d’Obama, autant en raison d’un contexte favorisant l’alternative vers les démocrates que par le fait que médiatiquement le symbole de la jeunesse et du dynamisme, du dépassement des barrières raciales, mais surtout le thème d’un changement, incarné de manière messianique, renouant avec “l’american dream” dans un contexte quasi apocalyptique, soit largement plus exploitables par le merchandising des médias que l’arrivée au pouvoir d’un prisonnier de guerre (guerre perdue) au crépuscule de sa vie.

A ce propos, l’arrivée au pouvoir d’une minorité n’est pas une première comme Noam Chomsky nous le rappelle: Evo Morales, le président Bolivien n’a pas fait couler autant d’encre (en raison de ses tendances politiques peu ouvertes à la globalisation et aux “corporates medias”) mais illustre d’une manière antécédente le même phénomène de dépassement des ségrégations raciales. En effet, les populations indigènes boliviennes sont autorisées à présenter des candidats aux élections seulement depuis 2004, ce qui souligne la fulgurance de cette révolution sud américaines des l’année 2005 ou Morales fut élu avec plus de 53 % de voix.

Les premières réformes

Lors de sa première journée, Obama a donné le ton en faisant une déclaration concernant les règles sur le lobbying au sein de son administration qui sont les plus restrictives jamais vues, limitant très profondément l’interaction entre les lobbys et l’administration . A cela il faut ajouter le gel des salaires au sein de l’administration (pour les salaires supérieurs à 100 000 dollars annuels) et pour rendre son administration plus transparente il annula des décrets passés par l’administration Bush protégeant les anciennes administrations contre les investigations a posteriori. Finalement il a remis en selle le Freedom of Information Act mis à mal par Bush sous le prétexte de la guerre contre le terrorisme. C’est un retour à la normale déterminant vers une politique transparente qui  produira certainement un nombre de révélations importants concernant les agissements de l’administration Bush durant les 8 dernières années.

Aujourd’hui encore, Obama a imprimé une rythme rapide, signant par décret la suspension de toutes les procédures judiciaires en cours à Guantanamo pour les prochains 4 mois, ainsi que la fermeture totale de sa structure à Cuba et des prisons secrètes de la CIA sous un an. Dans le même temps il a signé un second décret stipulant que les États-Unis se conforment désormais aux conventions de Genève sur les prisonniers de guerre mettant un terme aux techniques d’interrogations officialisées sous l’administration Bush, le débat sur le waterboarding et sa qualification comme une torture acceptable est donc clos.

La suite des événements

Dans les semaines à venir, Obama devrait poser les bases de reformes de plus grande envergures sur plusieurs front: le plan de relance économique qui devrait s’élever à 850 milliards de dollars, mais dont on se doute qu’il ne s’arrêtera pas à cette somme, la reforme du système de santé, la réforme du système éducatif,  les investissements dans les énergies renouvelables et sur le plan international un changement d’attitude des USA dans la médiation du conflit Israëlo-Palestinien.

Il est assez étrange de voir Obama mettre en place son programme de la sorte , aussi vite avec ce mélange d’humilité et de transparence, d’œuvrer avec brio à montrer un changement radical. En effet, la composition de son administration aurait plutôt tendance à ne pas être aussi progressiste que son programme ce qui était bien peu rassurant, beaucoup de militaires (quatre en tout), un trio de star ayant soutenus la guerre en Irak sans équivoque (Rham Emmanuel, Hillary Clinton et Joe Biden), un conseiller économique Lawrence Summers très impliqué dans la création même de la crise économique, ou encore la nomination de l’amiral Dennis Blair (qui est soupçonné de crimes de guerre dans la résolution de la crise du Timor oriental) de comme directeur de renseignements généraux américains. Peut être assisterons nous à une présidence dirigiste et moins centriste que prévue ( il est nécessaire de souligner le passé associatif d’Obama et son positionnement largement plus à gauche à cette époque) le tout encadré par les conseils pragmatiques d’un cabinet qui sur de nombreuses questions aura une position largement plus conservatrice.

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Toutefois il n’est pas question de gâcher le plaisir de voir la présidence Bush se terminer, et chaque élément visant à démanteler les traces de la précédente administration sera un progrès en soit, l’accumulation de signes suggérant un retour à une position moins impérialiste sera déjà perçu comme une réussite. Bush n’a fait qu’amplifier une politique internationale démente qui avait pris racines bien avant lui, découlant directement de la guerre froide et de la place centrale de la militarisation dans la politique américaine, cette la domination avait atteint un paroxysme insoutenable. Le contexte économique et l’instabilité géopolitique générale laisse envisager qu’Obama puisse endosser le rôle d’un président amenant son pays vers un déclin serein, démilitarisé et stabilisant sur le plan de la politique intérieure, laissant la place année après année à un monde multi-polaire, qui ne demandait qu’a prendre place à la fin de la guerre froide et dont on verra peut être surgir un autre impérialisme.

4 thoughts on “Obama, saison 1 épisode 1…”

  1. Wait and see à présent!

    Pour moi, la crise provient plus d’un problème de fond: le pouvoir d’achat!
    Les constructeurs sont tellement attachés à leur % de progression qu’il n’y a rien à faire: ça recommencera! En leur donnant de l’argent, on aide personne, on sauve les constructeurs (avec notre fric), mais il n’y aura pas plus de voitures vendues. L’effet? Tous les marchés deviennent frileux, on nous pousse à acheter, on a plus d’argent, et ça continue!

    Le fait qu’Obama soit un homme de couleur ne change rien, c’est un homme avant tout et c’est le président des USA, même si c’est tous un symbole, c’est sur.

    Sinon j’aime beaucoup les images, énorme boulot de Big Picture encore une fois!

  2. Suite à notre échange sur Twitter, dire simplement que je ne crois absolument pas que l’on assistera à de grands changements. Obama est devenu le président de la première puissance impérialiste du monde, et il n’y a rien qui laisse présager que celle-ci témoigne à l’avenir de davantage de compréhension pour les peuples du monde entier. Je m’attends à vrai dire à exactement le contraire : la débâcle économique aidant, les crispations des classes dominantes (dont Obama s’est également fait le porte-parole) s’intensifiant, la terreur que sait si bien imposer (vite et efficacement) l’armée US a encore de beaux jours devant elle. Obama ou pas (si l’histoire pouvait dépendre d’un individu, ça se saurait)…
    Oh, certes, les discours seront plus agréables à entendre, les idées qu’ils véhiculeront seront plus appréciées par la gauche (molle), mais dans le fond, l’essentiel sera préservé : la nécessité pour la puissance américaine, pour continuer à faire fonctionner son économie, à s’imposer dans le rapports de force avec les autres puissances , et ce sans jamais compter la misère et les traumatismes que cela provoquera…
    S’agissant de la situation aux USA eux-mêmes : les travailleurs des Etats-Unis vont devoir faire de plus en plus de sacrifices (c’est à cela qu’il fallait penser quand Obama évoquait dans son discours des “hard choices”) et probable que la bourgeoisie américaine pense qu’un candidat noir y parviendra mieux, c’est-à-dire sans provoquer trop de remous sociaux…
    A suivre donc. Sans illusion.

  3. @Heroow
    Je ne suis pas certain de pouvoir relier directement ton commentaire a l’article qui evoque relativement peu la crise financiere :)
    Evidemment que la couleur d’Obama n’a qu’une valeur symbolique lie directement a l’histoire recente de la segregation raciale aux USA.

    Mais sinon bien vu concernant la provenance des images, Big picture est desormais incontournabe, et je devrais surement me garder de me permettre de ponctionner quelques images pour le blog sans permission, mais c tellement tentant.

  4. @Prinkipo
    Je ne crois pas non plus qu’Obama va montrer “davantage de compréhension pour les peuples du monde entier” .En revanche je penses qu’il s’abstiendra de stigmatiser de maniere globale comme Bush l’a fait en creant son axe du mal, en agissant suivant une ligne manicheenne totalement arbitraire, malheureusement il se pourrait fortement que la stigmatisation des forces politiques en place se poursuive concernant le conflit israelo-palestinien comme semble le montrer la declaration de ce matin.

    Ma vision est legerement plus optimiste que la tienne, je penses que l’urgence a regler le probleme de politique interieure (le chomage n’est pas un probleme relatif a la politique internationale, seul le profit des multinationales trouve une imprecation avec la politique militariste) permettra de reduire considerablement l’influence des USA sur la planete qui pourrait amoindrir de lui meme sa position de force dans de nombreux dossier en preferant jouer sur la mediation diplomatique ou carrement l’indifference ( en particulier dans les dossiers ou la Chine sera impliques comme c’est le cas dans de nombreux problemes internes a l’Afrique). J’espere en faire un regne a la Gorbatchev pour etre clair… La fermeture de Guitmo, l’arret de la torture, le retour a une transparence du gouvernement ( meme si elle n’est que partielle) sont des signes positifs qu’il ne faut pas mettre de cote. Je prefere largemetn un pays en balance donnant des signes positifs contrebalancant les elements negatifs qu’une politique du tout autoritaire comme ce fut le cas durant les 8 dernieres annees.

    La situation interne aux USA touchera plus les plus demunis c’est inherent aux regimes capitalistiques et encore plus aux regimes coporatistes comme les USA. Toutefois cela n’empeche pas que certaines reformes necessaires se mettent en place, l’education, la sante sont des secteurs ou l’observateur moyen Europeen n’a meme pas idee de la situation Kafkaienne dans laquelle s’est mise les USA.
    En soit je suis certain que Obama pourra renverser beaucoup des abus de l’administration Bush, il en perpetuera d’autres, il ne resolvera pas tout, mais j’ai la certitude que les USA ne brandiront pas le bras militaire a tout va pour transitionner leur economie mercantile vers une economie de guerre, en tous les cas pas maintenant. Ce qui pourrait en revanche se passer et qui rejoint ton raisonnement c’est que Obama soit consideres apres 4 ans comme ayant echoue a maintenir le pays a flots malgre ses reformes en raison de la poursuite de la crise systemique (dans le sens ou il n’y a rien afaire qui puisse l’arreter) et que dans ce cas le pays bascule dans une situation d’instabilite interne qui necessitera une situation de guerre externe. Ce scenario la me semble plausible, oui… mais pour l’instant observons et analysons ;)

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