CAC 40: Halte aux bonus… et aux aides publiques?

Les nouvelles stupéfiantes se succèdent dans le contexte de la crise. 90 000 chômeurs de plus en France le mois dernier, 600 000 par mois de plus aux USA, et les entreprises au centre de la tourmente qui font polémique en raison du versement de bonus alors même que celles ci ont reçu l’aide du gouvernement que ce soit en France, mais surtout aux USA.
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Cette attitude du politique en temps de crise, comme des citoyens qui ne pointent du doigt les multinationales que quand le mal est fait a de quoi exaspérer, particulièrement dans le contexte Français. Obama a fustigé AIG l’assureur américain de vouloir payer des bonus à ses employés d’une hauteur de 165 millions de dollars alors même que l’entreprise est dans une situation financière catastrophique et que celle ci a perçu une aide publique de plus de 180 milliards de dollars.

Cette posture flatte autant les démocrates qui ne voient pas d’un bon œil le pouvoir des corporates que les républicains qui n’aiment jamais voir l’argent de leurs impôts être distribuée à tort et à travers par Washington (pas de chance AIG vient juste d’annoncer un plan de liquidation sur 4 ans). Cette réaction est légitime, et il est important de comprendre que dans la plupart des cas l’État fédéral offre des réductions d’impôts aux entreprises plutôt qu’un support de capital via des subvention. Il y a des exceptions qui sont votées au Congrés: les fameux earmarks qui s’élevaient à 18.3 milliards de dollars en 2008 soit tout juste 0.2% du PIB, ou moins de 0.7% du budget 2008 . Pour autant je n’adhère pas à la logique de l’exonération pour les entreprises bénéficiaires, mais…

on observe le même comportement en France, dans un contexte économique largement plus subventionné.

Le gouvernement, à juste titre dans le contexte de la crise, a fait infléchir la société générale, le crédit agricole, la BNP qui  ont renoncé au versement de bonus pour leur salariés alors qu’ils ont pu percevoir un bénéfice grâce a l’aide de l’État. Il semble logique de ne distribuer un profit que quand celui ci est le fruit d’un bilan positif et non le résultat d’un renflouement par l’État qui de toute façon devra être remboursé, en soit l’entreprise ne fait dans ce cas que des profits virtuels. Il serait donc logique en période de croissance que les bonus faramineux reversés par les entreprises du CAC 40, soulèvent moins l’indignation.

Pourtant, ces bonus sont ajustés en fonction des bénéfices, or quelle est la part des subventions dans les bénéfices du CAC 40? A combien s’élèverait les bonus distribués au sein du CAC 40  en période de croissance, si ces entreprises devaient rembourser intégralement les aides d’État avant de pouvoir distribuer leurs profits, par dividendes ou bonus ? Mais qu’en est il des aides publiques en temps de crise ou sous les montagnes de frics en période de croissance ?

Prenons l’exemple de 2006 , on compte un bénéfice de 91 milliards d’euros à mettre en perspective avec l’ensemble des aides publiques aux entreprises qui représentait près de 65 milliards d’euros, dont 90 % sont financés par l’Etat (cela donne à l’époque 3 % du PIB). Sachant que ” les entreprises du CAC 40 qui devraient payer 34,9% d’impôt sur leurs bénéfices, n’en payent que 26,6%”, et ce principalement en raison d’un large versement d’impôts à l’étranger, on ne peut pas dire qu’elles ne reçoivent pas un régime de faveur de la part de l’État Français. A ce propos, est il nécessaire de mentionner les voyages au Mexique pour soutenir l’industrie de l’armement ou les séjours de dictateurs libyens tous les deux peu fructueux, mais coûteux. Considérant que le CAC 40 reçoit aussi la plus grande part de ses subventions : 91% en 2006 !!! (merci à Dagrouik pour avoir dégoter le rapport de la cour des comptes 2006-2007) et que chaque année à croissance les bénéfices battent des records, comment se fait il que l’État ne récupère pas ses subventions dans la mesure où cela ne transforme pas un bénéfice en déficit ? Ah mais bien sur !!  les actionnaires ne seraient pas d’accord. Pour résumer la balance du CAC 40 en 2006 nous avons 91 milliards d’euros de bénéfices, 50 milliards de subventions, et 40 % des benefices reverses aux actionnaires, CQFD… reformulons donc la question: pourquoi cela n’indigne pas l’opinion autant que la perception de bonus lorsque l’État lâche des caisses de pognons en période de récession?

Dans le fond, le prêt à court terme consentie dans le contexte de la crise est probablement moins scandaleux que le don direct de subventions qui quittent les caisses de l’État sans retour.

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La Crise : Ce qui aurait du être fait, ce qui peut encore être fait

Pour ma part je ne bannis pas les bonus, voici donc deux vidéos fort intéressantes de Frédéric Lordon, économiste directeur de recherche au CNRS, réalisées par Marianne et qui résument parfaitement ce qui aurait du prévaloir depuis le mois d’octobre .

La suite :
Pour sortir de la crise, il faut nationaliser toutes les banques!
et Banques : les Etats-Unis seront-ils obligés de nationaliser?

5 thoughts on “CAC 40: Halte aux bonus… et aux aides publiques?”

  1. Dans le rapport de 2006/2007 de la cour des comptes, le chiffre est sans appel, sur 57 milliards d’Euros d’aides/exonérations étudiées : 9% concernent les PME , ni plus ni moins.

    Ce chiffre est a lui même effarant. Il me semble que les PME concentrent en fait 80% de l’emploi salarié. On voit donc une inversion. Qui expliquait en 2007 qu’il fallait inverser le ratio et rendre le système favorable aux PME qui créent de l’emploi ?
    Mais on l’a pris pour une conne.

    Nul doute que le poids des aides/exonérations au niveau du CAC40 ne soit une surprise. Ne t’inquiète pas certains se sont lancés sur le sujet et fouillent, demandent, interrogent.
    Je sais qu’en 2007, Carrefour pour 1 Milliards d’euros de bénéfices a bénéficié de 120 millions d’aides/exonérations (source syndicale). Le secteur de la grande distribution, aurait lui bénéficié de 250 millions d’aide/exonérations

  2. Pour faire echo a ton commentaire :

    “” La vision de la conjoncture économique varie énormément si vous êtes PME ou multinationale. Citant une analyse de Natexis-Banque Populaire, Le Canard Enchaîné du 30 août souligne que les entreprises du CAC 40 ont vu leur résultat s’améliorer de 30% en 2005 par rapport à 2004, et de 36% en 2004 par rapport à 2003. Chez les PME, en revanche, le résultat brut d’exploitation n’a gagné que 2,2% en 2004 et 0,3% en 2005.

    Moralité, il ne suffit pas de répéter que les PME constituent un gisement d’emplois, il faudrait peut-être aussi se pencher sur leur cas, plutôt que d’offrir des cadeaux fiscaux aux plus grosses entreprises.””

    Il y a de quoi gratter dans cet article tres complet sur la situation avant 2007 :
    http://fabienma.club.fr/medef/060830-aides-entreprises.htm

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